Ergun a écrit :mes réflexions sont : est ce qu'on peut vivre professionnellement de la permaculuture ?
Le bec Hellouin est le truc vers lequel tu sera probablement redirigé tôt ou tard. Ça ne fait pas l'hunanimité.
Sans même parler de permaculture, le non travail du sol est déjà une telle rareté parmi ceux qui en vivent... Je ne connais personnellement (localement donc) qu'un individu qui s'y essaye en tant qu'activité principale, mais ça ne lui rapporte pas assez s'il vivait sur ce seul revenu ; il au Pouldu en Finistère si t'es du coin, je peux filer un numéro, il est très ouvert (après, s'il sera viable un jour par la vente de légumes, ça reste un point d'interrogation) ; au fond lui comme la majorité des petites fermes en perma se retrouvent souvent à se convertir en centres d'initiation au jardinage amateur, aux visites pour les enfants ; ils multiplient leurs sources, quoi (ce qui au final n'est pas forcément mal : plus de sources, plus de résillence)
Ergun a écrit :si oui avec quel superficie et quel produit ?
Pour le coup c'est 1ha à 1,5ha (en maraîchage). Et c'est aussi 1ha minimum pour les aides, ce me semble. Grosso modo le Bec Hellouin encourage sur ces superficies minimumes en "intensif", et tous les bouquins et témoignages disent que c'est ce qu'il faut pour occuper une personne à plein temps.
Alors je n'ai rien de très optimiste dans mon coin. Si tu es un peu anglophone, il y a un podcaste "Permaculture Voices" qui fait en permanence (il doit y avoir des centaines maintenant) de témoignages de gens "en perma" qui gagnent leur vie par elle : apparemment par là-bas ça décolle (sous plein de formes, y a du maraîchage, mais aussi du consultant, du "urban farming", de la vente exclusive à des restaux haut de gamme, des micro fermes de plantes germées...). Mais je n'y suis pas, donc c'est biaisé ; mais ça a l'air drôlement plus fort qu'en Bretagne par exemple.
Personnellement mon idée de la chose, c'est qu'il y a peu de secteur plus violents que l'agriculture, et qu'il faut avoir de sacrées trippes. Les réglementations sont injustes (calendriers de graines par exemple), les tentations fortes (acheter en motte à un gros est trèèèès tentant : gain de temps, de productivité ; subventions sur irrigation et serres...), les petits on du mal à trouver leurs amadements (par exemple trouver des amandements calcaire pas trop micronisés est assez difficile apparement)... Sans compte que la culture du consomateur n'est pas "ho c'est chouette, tu fais le bon combat, je te soutiens !" ; il veut des tomates rondes et rouges pas trop grosses ni trop petites, des pommes de terres jaune regulières... Bref, il ne faut pas oublier qu'on est dans un monde capitaliste qui a conditionné nos goûts, et qu'on ne change pas tout d'un coup. Particulièrement, on peut être intellectuellement convaincu du bien fondé d'une position tout en étant incapable de la suivre (le gars qui va tourner le talon en voyant un certain prix, ou un légume "sale", etc.).
Globalement je pense que c'est pas le métier à prendre à la légère parce qu'on croit aller dans le bon sens ; c'est un gros travail sur soi entre compromis et réalités du marché.
J'ajouterai que des maraîchers que je connais (tous en bio), ceux qui étaient le plus proche de la perma étaient ceux qui vivaient le moins de la vente de légume. Mon sentiment c'est que pour avoir une agriculture 100% cohérente, soit il faut vivre dans une communauté de gens qui sont prêt à subir leurs choix idéalogiques sur tout ce que ça représente (plus cher(?), légumes bizarres, non calibrage, irrégularités...), soit il faut... S'adapter, essayer d'éduquer.
Y a des trucs chez les 'ricains qui sont assez chouette apparemment : des AMAP où les produits arrivent "en brut", et les adhérents font eux-même la répartition et leurs paniers (avec des mécanismes pour mettre de côté des choses que vous utiliserez pas -allergie, absence...- qui peuvent être librement pris par quelqu'un d'autre, etc. ; des systèmes de retour et de commentaire sur ce qui est fournit...).
Fin y a des populations qui acceptent de faire ça, et d'autres qui en sont à des lieux, tout dépend de ton ecosystème social dans lequel tu t'implentes, au final. Tu peux tomber sur une région qui recherche absolument des produits locaux (restos, population engagée...), ou des gens très "traditionnels"...