Un article du monde...
L'Institut Vavilov en Russie (
http://www.vir.nw.ru/) -
http://www.regard-est.com/home/breve_contenu.php?id=915, est l'une des plus grandes et des plus anciennes banques de semences du monde et
la plus grosse collection de fruitiers et de baies au monde; il à un jardin horticole fabuleux, pour lequel certains horticulteurs ont donné leur vie dansle passé (2eme article). Une merveille en péril.
Pour ceux qui se sentirait d'aller faire un trip en Russie, avant les tracto-pelles et les bulldozers.
"370 types de prunes" - "300 sortes de groseilles à maquereaux" - "1 000 variétés de cassis" - "7.459 variétés de tomates dont 197 sont des variétés sauvages", (et moi, et moi , et moi ?...)
Russie : le jardin horticole de Vavilov est menacé par des promoteursC'est un vaste jardin sur une pente douce et ensoleillée, 500 hectares de bonne terre plantée d'arbres fruitiers, de baies et de fleurs à 30 kilomètres au sud de Saint-Pétersbourg. Ce paradis de la biodiversité est situé aux environs de Pavlovsk, une bourgade impériale dotée d'un magnifique palais où aimait à séjourner le tsar Paul Ier (1754-1801), le fils de la grande Catherine.
Enfoui derrière des grilles rouillées et des herbes hautes, ce jardin, riche de 12 000 espèces de plantes, n'est pas un endroit ordinaire. Il est la "banque génétique à ciel ouvert" de l'Institut russe d'horticulture de Saint-Pétersbourg, fondé en 1926 par le généticien Nikolaï Vavilov.
Depuis peu, cette collection horticole unique au monde est menacée d'être livrée aux promoteurs. L'Agence fédérale du logement, qui a reçu de l'Etat 91 hectares de cette précieuse terre à titre gracieux, est impatiente de vendre le tout aux enchères. Une opération juteuse qui devrait rapporter au total 1 milliard de roubles (25 millions d'euros). Les acheteurs, des promoteurs immobiliers, se pourlèchent déjà les babines. Sans aucun doute, les "cottages" construits à cet endroit pour Pétersbourgeois fortunés vont s'arracher comme des petits pains.
Les 300 employés du domaine sont sous le choc. Depuis avril, l'Agence du logement fait pression pour qu'ils libèrent les parcelles concernées. La première vente aux enchères était prévue, en principe, au 23 septembre. "Quand je pense que ma collection de pruniers va être détruite par des bulldozers, ça me rend malade", confie Olga Radtchenko, une petite femme mince à lunettes, la cinquantaine, blouse blanche de botaniste et bottes de caoutchouc aux pieds.
A Pavlovsk, chaque scientifique a la responsabilité d'une "collection". Olga Radtchenko gère 370 types de prunes. Résidant à Saint-Pétersbourg, elle parcourt chaque jour un long trajet (deux heures en bus, métro, train de banlieue, bus à nouveau) pour se rendre à son travail. Sa collègue Natalia Poupkova surveille, elle, 300 sortes de groseilles à maquereaux et Olga Tikhonova règne sur 1 000 variétés de cassis.
Le personnel fonctionne à l'enthousiasme. Les salaires sont maigres (8 000 roubles en moyenne, soit 200 euros), le matériel fait défaut et le bâtiment de l'administration tombe en ruines. Une blague circule d'ailleurs à Saint-Pétersbourg à propos des botanistes et des généticiens de l'institut Vavilov, "prêts à payer de leurs poches pour pouvoir travailler".
Mardi 31 août, les trois femmes et leurs collègues sont aux aguets. Rassemblé devant le bâtiment de l'administration, le petit groupe attend de pied ferme les membres de la commission chargée de rendre un rapport sur le bien-fondé ou non de la vente des parcelles. Depuis peu, le sort du jardin de Pavlovsk a commencé à émouvoir l'opinion publique ainsi que la communauté scientifique, russe comme internationale. Des pétitions ont été adressées au président Dmitri Medvedev, les médias se sont emparés du sujet.
Bientôt, les grosses cylindrées allemandes des fonctionnaires arrivent dans un nuage de poussière, filmées par les caméras des principales chaînes de télévision accourues sur les lieux. "Les voilà ! Vont-ils aller voir les collections ? On y va nous aussi ?", interroge une femme. Les autres lui font signe de se taire tandis que les officiels pénètrent dans le bâtiment.
Dans son bureau du premier étage, Fiodor Mikhovitch, le directeur du domaine, est au comble de l'excitation. Il vient de rentrer de Moscou où, la veille, il a été reçu en audience au Kremlin par le président Medvedev. "Il m'a dit que je devais aller jusqu'au bout et qu'il me soutiendrait. Il m'a recommandé d'insister sur la nécessaire transplantation des collections, ce qui devrait prendre entre dix et quinze ans", se réjouit-il. Cet homme volubile, la quarantaine, vitupère contre ceux qui convoitent une partie du domaine : "Ils se fichent pas mal de nous, ils veulent juste se remplir les poches sans rien faire !" Puis il ajoute, songeur : "J'espère que je ne vais pas me faire virer."
Juridiquement, la vente d'une partie du jardin est légitime. A l'époque de l'URSS, la notion de propriété de la terre n'existait pas, le jardin avait donc été donné en jouissance à l'Institut. En 1995, l'Etat a récupéré les terres pour les transmettre, beaucoup plus tard, à l'Agence du logement qui en est désormais l'incontestable propriétaire. Les scientifiques de Pavlovsk, le nez dans leurs plantations, n'ont rien vu venir. En août 2010, un tribunal d'arbitrage a estimé que la préemption des terrains par l'Agence était légale.
A la fin du mois d'août, les choses ont bougé. Tout a commencé par un message envoyé par M. Medvedev sur son Twitter. Depuis, la vente aux enchères fixée au 23 septembre a été repoussée. La transformation du jardin de Vavilov en "cottages" est très malvenue au moment où la Russie subit des incendies sans précédent. De juin à août, déjà 13 millions d'hectares ont brûlé, des centaines de variétés d'arbres, de plantes et de fleurs ont été réduites en cendres dans le pays.
Le rapport de la commission est attendu pour le 15 septembre. "On espère, sans y croire. Avec de telles sommes d'argent en jeu, nous ne faisons pas le poids", soupire Natalia.
LE SITE
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Le sacrifice de treize botanistes pendant le siège de LeningradSitué dans deux magnifiques immeubles sur la place Saint-Isaac, l'un des plus beaux endroits de Saint-Pétersbourg, l'institut d'horticulture Vavilov recèle la quatrième banque de semences au monde. Et 330 000 variétés de plantes y sont conservées.
Menacé de perdre une partie de ses collections à Pavlovsk, jardin à ciel ouvert convoité par les promoteurs, l'institut n'en est pas à ses premières turpitudes. De septembre 1941 à janvier 1944, durant le siège de Leningrad (l'ancien nom de Saint-Pétersbourg) par l'armée allemande, treize de ses collaborateurs ont veillé jour et nuit sur la banque de semences.
"Il n'y avait rien à manger. Comme ils étaient trop faibles pour aller de leur travail au domicile, ils sont restés sur place", raconte Igor Loskoutov, spécialiste de l'avoine et responsable du musée de l'institut. Ils sont tous morts de faim, "sans toucher à la collection de graines", précise le botaniste en montrant leurs photos.
Les murs sont ornés de portraits du savant Nikolaï Vavilov qui dirigea l'institut de 1921 à 1940, année où il fut arrêté par la police politique comme "ennemi du peuple". Jusqu'à la mort de Staline en 1953, prononcer le nom de Vavilov, c'était risquer la mort. "Dans les années qui suivirent, ça n'était pas très recommandé non plus ", précise Igor Loskoutov. C'est seulement en 1967 que l'institut prend le nom de Vavilov. Depuis, le savant a été réhabilité, mais son dossier, conservé dans les archives de l'ex-police politique, est resté secret.
Avec l'effondrement de l'URSS en 1991, l'institut perd les stations horticoles des républiques ex-soviétiques et leurs semences. Puis vient le douloureux passage à l'économie de marché : les financements se tarissent, les salaires des employés ne sont plus versés.
En 1991, les ennuis redoublent. Sur oukase du Kremlin, l'un des bâtiments change de mains. La nouvelle propriétaire est l'administration présidentielle russe. La direction de l'institut saisit un tribunal d'arbitrage et gagne. "J'espère qu'il en ira de même pour le jardin de Pavlovsk", dit M. Loskoutov.
Pour lui et ses collègues, l'affaire de Pavlovsk illustre le peu d'intérêt de l'Etat russe pour ses scientifiques. "De gros financements sont prévus pour Skolkovo (projet de Silicon Valley à Moscou), mais notre budget va être rogné de 15 %", déplore M. Loskoutov. Or l'institut peine déjà à boucler ses fins de mois. Cela fait belle lurette que les expéditions scientifiques sont financées par d'autres pays.