Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituelles

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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par flyingdust » 16 Jan 2016 21:23

Je pense qu'il a du le supprimer lui même en jugeant que ce n'était pas assez bon, il se corrige souvent :D
Y avait l'argument avec lequel je suis assez d'accord, de l'absence de sol pendant des milliards d'années sur terre, et que ce processus de création de sol, d'agradation, accentué encore par l'apparition des arbres à feuillage caduque il y a très peu de temps à l'échelle de l'âge de la terre, consistant à dédensifier des matières en y injectant de l'oxygène, de l'eau, du carbone, de l'azote, et avec ça un pannel de formes de vies qui trouvent dans cet interface des lieux de vie suffisamment hospitalier, ce processus, c'est bien de l'augmentation de fertilité, à partir de l'augmentation de l'interface sol/atmosphère.

Donc oui les quantitées de minéraux sont limitées, mais on est probablement loin de les avoir exploitées (les racines d'un chêne peuvent descendre à 140 m de profondeur, c'est bien plus que la plus puissante des machines humaines, on a donc de la marge avec l'agroforesterie, avant d'épuiser, mettons 50 mètres de sous sol)
Encore oui, si on évacue régulièrement la mo pour la vendre (fruits, légumes,...) et qu'il n'y a pas de retour de celle ci, sous forme de pelures et d'excréments, il paraît difficile de maintenir des rendements élevés sans aucun intrant.

Par contre non, le système peut produire plus de fertilité en circuit fermé. Rien qu'au niveau d'une prairie, en limitant la pâture, puis en bloquant le développement forestier au niveau lisière (favoriser les pionniers, limiter les climaciques, broyer les rameaux et les répartir uniformément,...), les résultats sur la productivité sont connus. Et l'interface air/sol peux augmenter si l'on ne bloque pas l'assimilation de la mo par compactage.

Et je reviens sur la faim d'azote du brf, en paillant un verger avec un brf bien répartit, j'ai la forte impression que ça dynamise les populations de vers de terre, du coup on peux faire "paturer" davantage de poules, ça va faire plus d'azote, donc une meilleure santé des fruitiers, meilleure production,...

Donc je persiste à penser qu'en utilisant avec beaucoup de finesse les outils végétaux, animaux, matériels qu'on a à disposition (ex: faire sa lessive avec des cendres, traiter l'eau dans une roselierre, faucher et broyer les roseaux, les utiliser comme paillage)
Il est tout à fait logique de pouvoir augmenter la fertilité d'un lieu, sans aucun intrant ni sortant.
Mais c'est sur ce n'est pas en regardant la nature faire, sans intervenir que ça se fera, ou alors à échelle de temps très longue.
Le moment où il faut intervenir, c'est la récupération de la mo accumulée par le bouleau en empéchant le chêne de se l'approprier :-)

Donc, je synthétise:
Je pense que la fertilité d'un lieu peux augmenter en circuit fermé. L'augmentation de la fertilité, c'est l'agrandissement de l'interface sol/air, donc toute la partie aérobie du sol et cette interface n'a fait qu'augmenter depuis des centaines de millions d'années.
Et l'humain peux sans doute jouer un rôle accélérateur dans l'agrandissement de cet interface, puisqu'il a été capable d'altérer cet interface à ce point et aussi vite.
Modifié en dernier par flyingdust le 16 Jan 2016 22:58, modifié 1 fois.
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par 0tyugh » 16 Jan 2016 22:18

flyingdust a écrit :Je pense qu'il a du le supprimer lui même en jugeant que ce n'était pas assez bon, il se corrige souvent :D

Exact. M'arrive souvent de faire un monologue, et de le relire, et d'avoir honte de ma présomption ; je suis contre le "small talk" et la loghorée dans la mesure du possible, et j'en laisse échapper beaucoup parfois, donc quand je peux, je limite. Ce qu'on écrit à chaud ne reflète pas forcément ce que l'on pense, plus une réactance, je trouve donc improductif de l'imposer aux autres :rouge:
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par Madudu » 16 Jan 2016 23:59

Pour le coup je trouve ça dommage, il s'agissait d'un questionnement légitime :)

Un moment donné tu disais un truc du genre "la nature est capable de produire de la fertilité puisqu'à partir d'une roche nue il fait un truc mieux que la roche de départ en terme de fertilité".

C'est tout-à-fait vrai ! Dans un premier temps le sol s'épaissit, la quantité dispo totale de minéraux utiles aux plantes augmente. Et ce pendant pas mal de temps, jusqu'à ce que ce que les processus qui ont permis cette pédogenèse (dissolution aux acides surtout) aillent "trop loin", qu'ils fassent "vieillir" le sol :

-certains éléments comme le Ca et certains oligoéléments viennent à manquer à force de se faire lixivier la tronche, le sol devient de plus en plus acide

-les acides dégomment une partie des argiles

-une autre partie migre en profondeur où elle perturbe la circulation de l'eau (hydromorphie en période humide, sécheresse rapide en période sèche)

-l'hydromorphie temporaire fait migrer le fer en profondeur, où il finit par former une dalle imperméable qui accentue encore ces phénomènes

-l'érosion pédologique (celle qui intervient même en l'absence d'activité humaine, car elle existe même si elle est faible) finit par emporter presque tout le P accumulé pendant des siècles voir des milliers d'années en surface, petit à petit.

-et paf, voilà un bon podzol tout pourri ! :hehe:

Et encore ça c'est la version longue, quand la "roche-mère" initiale est un tas de sable sédimentaire comme dans les landes ou à fontainebleau, le podzol se forme direct sans passer par la case "sol fertile".

Y a aussi la version "Sologne" : un sol trop cool plein d'argile, profond et tout, et paf y a une montagne de sable vaguement limoneux (issu des granites du massif central en l'occurrence) qui lui passe dessus. Ca fait un sol tout pourri hydromorphe/séchant façon podzol, avec 0 fertilité minérale. En fait il faut juste attendre que le sable soit complètement érodé et laisse l'argile revenir en surface, et à cette tâche il faut reconnaître que l'homme sédentaire est super efficace (mais faut quand même quelques milliers d'années, parce qu'il n'y est pas encore arrivé en Sologne :hehe: ).

En milieu tropical humide y a des variantes :

-Y a la version "j'attends pas le podzol que je te met une dalle de plusieurs mètres d'épais d"oxydes de fer, même que je t'en met plusieurs de suite si j'ai eu le temps comme ça c'est sûr que t'arrivera plus jamais à atteindre la roche-mère et comme ça je suis sûr qu'à la surface y aura plus rien à bouffer à cause de l'érosion pédologique".

-Y a la version "trop d'eau pour la dalle de fer" : là le sol devient super épais et comme il flotte un max tous les minéraux se barrent par le bas, du coup tu finis avec la chance d'avoir un sol de 60m d'épais mais avec rien dedans. Comme c'est humide personne va voir au fond (y a pas d'O²), et si ça devient plus sec on revient au cas précédent : une bonne grosses dalle. Et puis quand y a eu des alternances sec/humide t'as une dalle même si c'est humide, et le sol est vide même si c'est sec.

-Y a aussi la version "super sèche" ; il pleut tellement pas que soit y a 3 cactus/ha soit le sol est salé. Allez, y a une variante sympa : t'as droit à 1t d'herbe/ha/an.

Bon... c'est vrai qu'en milieu tempéré on la chance d'avoir des sols jeunes, les périodes glaciaires ayant la générosité de tout racler à coups de glaciers géants qui foutent tout à la mer. En fait on a du bol, on est naît au bon moment au bon endroit :hehe:

Bon, sauf dans certains sols de craie avant les phosphates et la potasse, y avait tellement rien à bouffer pour les plantes qu'on appelait ça "la champagne pouilleuse" (aujourd'hui on y fait des rendements de malade). Y a aussi les sols acides reposant sur le vieux socle hercynien en Bretagne, où on bouffait surtout du seigle (vous avez déjà mangé du pain de seigle pendant ne serait-ce qu'une semaine ? moi pas :hehe: ). Heureusement que la patate et le sarrasin sont arrivés jusqu'à eux ^^ , pauvres bretons... C'est sans compter aussi les sols lessivés de l'Ouest du massif central, les lieux un peu élevés sur sols siliceux, les marécages qui couvraient une bonne partie de nos plaines actuellement fertiles, etc, etc, etc...

Je serais injuste envers "la nature" si je ne mentionnais pas l'existence des sols de steppes, qui se forment en milieux continentaux (-30 l'hiver, +30 l'été) : ils échappent au lessivage des argiles, à la migration du fer, à la salinisation... bref, le bonheur :) Par contre il ne pleut pas beaucoup et y a que le seigle (et encore) qui survit à l'hiver si y a pas assez de neige, et l'été ça cogne dur donc les cultures ont des cycles courts. Mais le sol est fertile !

Bref, après ce rapide aperçu vous comprendrez que je ne considère pas "la nature" comme un truc parfait. Mais je reconnais que c'est un truc bien foutu et généreux, à partir du moment où y a du P, au moins un peu de Ca, des oligos et du K : car là tout est possible :)

Quand y a pas ça (surtout le P, le Ca et les oligos), y a intérêt à pouvoir s'en procurer parce que c'est pas "la nature" qui va l'inventer... C'est pas pour rien que les phosphates, le guano, la chaux et la marne ont eu du succès dès le XIXe :)

Personnellement si je m'installe un jour, je sur-fertilise en P. Ca fera du stock pour mes descendants qui, eux, n'auront probablement plus de phosphates.
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par 0tyugh » 17 Jan 2016 01:22

Une réponse intéressante à une réflexion naïve. Cependant je trouve que ça demande approfondissement, du coup. Ce vieillissement des sols, à quelle vitesse naturellement ? Et à quelle vitesse sous le labour / ou avec ou sans arbre ?

Il me paraîterait logique qu'il soit rentable de diminuer la lessivation du Ca et autres bases, au maximum, du coup ? Mais je ne mesure pas à quel point ça freinerait le phénomène.


Aussi j'ai quelques contre argument sur l'idée que ce schéma soit aussi vrai que ça :
La faune n'est pas sensé ramener continuellement des éléments minéraux au-dessus ? Un arbre ne peut pas virtuellement ramener les éléments à quelque profondeur qu'elles soient ? (zut, je lis le topic à l'envers, c'était déjà dit :o)
(les racines d'un chêne peuvent descendre à 140 m de profondeur, c'est bien plus que la plus puissante des machines humaines, on a donc de la marge avec l'agroforesterie, avant d'épuiser, mettons 50 mètres de sous sol)

Beaucoup de roches mères contiennent des éléments basiques bloqués dans la roche, à priori si les systèmes racinaires bossaient à les extraire, ça pourrait faire très très très long feu, non ?

Aussi il faut toujours se demander à quelle échelle on parle (de temps par exemple : dix ans, mil ans, des centaines de milliers d'années pour vieillir un sol de foret ?), et quel est l'impact de l'un ou l'autre, et quel est notre certitude sur les impacts de tel ou tel phénomène. Chose que je serais bien en peine de préciser.

Si l'acidification était lente, on pourrait peut-être l'arrêter simplement en utilisant des produits de la mer ; mais encore une fois je suis bien en peine de quantifier ce que ça fait en besoin et combien ça peut donner.

(Aussi, je suis curieux d'où te vient autant de connaissances, t'as été ingénieur agricole ou c'est par la curiosité ? ^^' )
... (et je sais pas ce que t'as contre le seigle. C'est pas super digeste, mais un bon pain de saigle, ça passe très bien avec la soupe ! :o)
(...Dur d'attaquer les thèse en anglais. Le format d'une thèse est vraiment une saloperie selon-moi; pour avoir aidé quelqu'un à faire la sienne ; énormement des vices à devoir faire plaisir à tel ou tel chercheur du jury en citant telle expérience ou tel chercheur. J'ai assez peu de plaisir à décortiquer ce format : ce ne me semble pas un bon support de partage de savoir.)
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par Madudu » 17 Jan 2016 16:13

Le labour augmente très significativement l'érosion, donc les pertes de minéraux (qui sont toujours plus concentrés en surface du fait des dépôts répétés de litière), surtout le P "assimilable" qui est très peu mobile et très lentement accumulé depuis le "P total". En passant, le problème des phosphates dans l'eau n'est pas dû à une sur-fertilisation en P, il est dû à l'érosion du sol (après, plus il est riche P et plus il perd de P pour une même quantité de terre érodée).

Mais en limitant l'épaisseur du sol, le labour "rajeunie" le sol : ce qui est très mauvais à des échelles de temps relativement courtes (suivant les cas de l'année au siècle, jusqu'au millénaire), mais qui peut s'avérer bénéfique à des échelles plus longues (exemple des glaciations, des sables de Sologne, de pas mal de sols tropicaux, ...).


Petit point sur la terminologie :

-la lixiviation est une migration verticale de substances solubles dans l'eau

-le lessivage est une migration verticale de colloïdes (argiles minéralogiques, certains compartiments de "l'humus", oxydes métalliques colloïdales, ...)

-un colloïde est une particule dont les propriétés sont intermédiaires entre un ion et une particule insoluble dans son milieu (dans notre cas, ce sont des solides dans l'eau) : ils sont assez petits pour que leur charge électrique détermine leur comportement dans leur milieu (ici, un milieu aqueux) mais trop gros pour être dits "en solution" (dissous). Par exemple lorsqu'on met de l'argile dans un tube et qu'elle ne se dépose pas au fond (elle ne précipite pas) elle se comporte comme un ion dont les charges électriques se repoussent : les particules d'argiles restent toujours à la même distance les unes des autres et ne peuvent donc pas se réunir au fond malgré le fait qu'elles sont plus denses que l'eau. Lorsqu'elle précipite, par exemple en présence d'une quantité suffisante de Ca²⁺, leurs charges électriques (négatives) sont compensées par des charges positives et, la répulsion étant amoindrie, elles peuvent se réunir au fond sou l'effet de la gravité ; elles se comportent comme un solide insoluble dans l'eau.


Donc, pour en revenir au sujet : la lixiviation du Ca est, entre autres, liée au fait que le besoin qu'en ont les plantes, donc le flux de Ca remonté par les plantes, est moindre que celui qu'il faudrait pour que la seule consommation par les plantes de Ca suffise à en conserver un niveau optimum pour les propriétés physico-chimiques du sol.

A cela il faut ajouter qu'en milieu humide tous les éléments solubles sont sujets à la lixiviation et que, même si la quantité lixiviée chaque année est faible, à l'échelle des milliers d'années ça suffit pour appauvrir significativement le sol en cet élément. Ajoutons à cela un petit cercle vicieux : moins de Ca = baisse du pH = diminution de la CEC par effet d'éviction du Ca²⁺ par H⁺ = encore plus de pertes de Ca. Et on se retrouve avec un problème qui n'a pas encore trouvé de solution, même pour cette "nature" si bien faite. La terra pretta pourrait être une exception, le travail humain consistant à déplacer du calcaire depuis l'endroit où il se trouve vers les endroits où il ne se trouve pas est également une solution satisfaisante (y a aucun risque d'épuisement de la ressource pour le coup).

En préventif, ou simplement pour limiter les besoins en importation de calcaire (et de tous les autres éléments sujets à la lixiviation), il existe également des leviers d'action :

-faire pousser des plantes à forts besoins en Ca et autres oligos, typiquement des légumineuses fixatrices d'azote, pour augmenter le flux de Ca remonté par la végétation.

-faire pousser des plantes riches en oxalates de calcium : renseignez-vous sur "la voie oxalate-carbonate" (ici par exemple : https://doc.rero.ch/record/5513/files/1_these_BraissantO.pdf). En gros ça permet de limiter la mobilité du Ca, et ça peut même conduire à formation de calcaire sur sol initialement déssaturé en Ca à cause des raisons énumérées ci-dessus.

-maximiser la consommation totale d'eau par les plantes pour limiter la quantité d'eau qui sort du profil chaque année, et donc limiter les lixiviations de toutes sortes : en sol superficiel il suffit d'une végétation herbacée active toute l'année (on peut pas faire beaucoup mieux), en sol profond ça peut consister à associer des arbres aux cultures pour consommer plus de flotte en été (et de l'eau moins accessibles aux herbacées, car l'arbre agroforestier va chercher plus loin que les herbacées, et aussi plus loin que l'arbre forestier).

Bon, à nos échelles de temps on voit clairement que le problème du Ca est largement soluble (oserais-je dire :hehe: ). Ne serait-ce que par apport de calcaire, ce que la nature ne sait pas faire (à quelques exceptions près, qui ne sont que des exceptions).

Le P est beaucoup plus problématique : il est très peu représenté dans les roches-mères et dans les sédiments (le basalte est plutôt riche par contre), sous des formes très réfractaires au changement (surtout sous forme d'apatites) et, c'est l'inconvénient de l'avantage, comme il n'est pas sujet à la lixiviation il est très sensible à l'érosion (même pédologique).

Du coup tant qu'on a des sédiments riches en P (phosphates marocains pour l'essentiel) pour combler les manques, pas de problème. Mais lorsqu'ils seront épuisés (d'ici quelques décennies à un siècle ou deux) on se retrouvera dans la même situation qu'avant : on va à nouveau vivre sur un stock de P très peu renouvelable, et très sensible à l'érosion.

C'est là un des vrais enjeux de l'agronomie contemporaine : arrêter tout travail du sol pour limiter au maximum l'érosion, pour conserver le plus longtemps possible le plus de P possible. C'est là aussi un des vrais enjeux de notre société contemporaine : il s'agit de récupérer environ 100% de nos crottes pour les ramener au champ, et lorsqu'on n'aura plus de phosphates il faudra aller plus loin ; il faudra limiter au maximum nos exportations de produits riches en P (toutes les graines, les os, et dans une moindre mesure tout le reste).

Évidemment la minimisation de l'érosion est aussi très importante si on veut pérenniser l'agriculture, qui a besoin de terre quand même, ne serait-ce qu'à l'échelle de quelques dizaines de milliers d'années (jusque là l'agriculture a toujours mis moins de 10 000 ans pour transformer un pays de Canaan en désert, sauf dans les rizières terrassées).

L'avantage avec le P c'est qu'il est très peu soluble, du coup on peut le conserver même si on fait composter en plein air sous la pluie : on perd un paquet d'N, de Ca, de K, etc, mais très peu de P. On en récupère même une bonne partie juste par décantation des eaux usées (il est fixé aux colloïdes que l'on récupère après précipitation).

Par contre il va falloir trouver une solution pour que nos eaux usées ne soient plus contaminées aux métaux lourds :hehe:

En attendant à court terme c'est l'azote le principal facteur limitant, du coup faut aussi parler de C/N, d'azote totale, d'azote dispo, d'efficience de l'azote, etc ! :P
Modifié en dernier par Madudu le 17 Jan 2016 16:25, modifié 1 fois.
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par Madudu » 17 Jan 2016 16:21

Sinon, c'est surtout par curiosité que j'ai découvert tous ça. Et comme je suis pas chercheur ou ingénieur je n'ai pas accès à l'essentiel de la littérature scientifique (qui est payante). Du coup je me rabat, faute de mieux, sur les thèses (domaine publique = gratos).

Mais c'est vrai que la plupart des thèses sont vraiment très nulles, avec des protocoles pourris, des biblio arrangeantes et des conclusions erronées X|
Y en a quand même quelques unes de bien, au moins pour la biblio :)
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par flyingdust » 17 Jan 2016 17:22

Beaucoup de bon sens, et je voulais rebondir sur ça:-maximiser la consommation totale d'eau par les plantes pour limiter la quantité d'eau qui sort du profil chaque année, et donc limiter les lixiviations de toutes sortes : en sol superficiel il suffit d'une végétation herbacée active toute l'année (on peut pas faire beaucoup mieux), en sol profond ça peut consister à associer des arbres aux cultures pour consommer plus de flotte en été (et de l'eau moins accessibles aux herbacées, car l'arbre agroforestier va chercher plus loin que les herbacées, et aussi plus loin que l'arbre forestier).

Pour remplir cette fonction la, l'agroforesterie est clairement la plus adaptée, elle permet à la fois un couvert végétal de surface dense toute l'année, et une couverture multiétagée, assurant le maximum de consommation d'eau.
La lisière maintenue par l'homme est d'autant plus intéressante qu'elle permet l'installation de grands arbres, et donc une meilleure colonisation photosynthétique de l'espace aérien.
Je serai curieux à ce propos d'avoir un ordre de grandeur pour les consommations en eau de persistants tels le pin sylvestre en période hivernal. Associer persistants et caduques pour lisser un peu les excès d'eaux hivernaux paraît un petit plus également dans la lutte contre la lixiviation.

En fait la forêt est imparfaite car la densité d'arbres à l'hectare limite la strate herbacée pendant la haute saison (surtout le hètre de l'étude dont tu as partagé le lien) et la lisière est imparfaite car elle n'est svt constituée que d'arbres jeunes, qui n'ont donc qu'une faible capacité d'exploration des profondeurs du sol.
L'agroforesterie est un entre deux particulièrement intéressant puisqu'il s'inspire du modèle de la lisière avec des arbres plus âgés.
Il m'apparaît par contre dommage de couper les arbres aussi tôt, impératif économique oblige.
J'espère un jour voir arriver des arbres de port libre dans des systèmes maraîchers, vergers, qui n'auront pas de fonction économique direct, mais apporteront de la rentabilité par l'ensemble de services qu'ils fournissent (ex: pin sylvestre dans un verger: zone de nidification, consommation d'eau en hiver donc lissage des excès d'eau, aération du sol par l'oscillation de la cime lors des vents), atténuation de la violence des pluies,...)
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par 0tyugh » 18 Jan 2016 01:08

Tout d'abord chapeau bas. Me sens toujours plus humble de jours dans le domaine, moi >.>

Quand tu dis que le labour rajeunit les sols, je ne suis pas sûr de saisir. Si le sol dégage, on se retrouve avec la roche mère et des siècles à attendre pour qu'un début de sol arrive, non ? Je dois mal comprendre le principe du rajeunissement. Entre un sol acide et pas de sol, il vaut mieux pas de sol ? o.Ô
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par Madudu » 18 Jan 2016 16:44

Pour remplir cette fonction la, l'agroforesterie est clairement la plus adaptée, elle permet à la fois un couvert végétal de surface dense toute l'année, et une couverture multiétagée, assurant le maximum de consommation d'eau.
La lisière maintenue par l'homme est d'autant plus intéressante qu'elle permet l'installation de grands arbres, et donc une meilleure colonisation photosynthétique de l'espace aérien.


L'association arbres-cultures d'hiver, qui est la seule qui soit applicable avec profit sur une grande partie du territoire, ne permettra jamais à elle seule d'obtenir un couvert dense toute l'année (en été notamment) : la densité du couvert ligneux (nombre d'arbres/ha) doit être limitée par les besoins en lumière de la culture d'hiver sur la fin de son cycle, les arbres ne peuvent donc pas ombrager la totalité de la surface en été si on veut maximiser leur complémentarité avec la culture.

Par ailleurs la lumière n'est pas mieux valorisée par un ligneux que par une herbacée, bien au contraire, donc on augmente pas a priori l'efficience de la lumière en introduisant des arbres : l'arbre doit toujours se cantonner à valoriser pour l'essentiel des ressources qui ne sont pas utilisées par les herbacées (eau profonde, reliquats et lumière estivale dans le cas d'une association arbres caducs/cultures d'hiver).

J'en avais déjà parlé ailleurs, mais je le répète quand même : l'effet lisière n'est pas lié à une meilleure efficience d'utilisation de la lumière par les végétaux, mais à une augmentation locale de l'interception de la lumière, aux dépends des zones que la lisière ombrage (c'est moins une complémentarité qu'un simple effet d'éviction). Une maximisation de l'interception de la lumière par la végétation n'a pas besoin d'avoir recours à un modèle 3D très élaboré de la structure du couvert, dans la quasi-totalité des cas il suffit de maximiser l'indice foliaire, c'est-à-dire la surface foliaire totale (m²)/surface occupée (les m² situés à l'aplomb de la végétation). Pas de m³ donc, mais des m² :)

Après, effectivement, associer des espèces à architectures différentes peut aider à maximiser l'indice foliaires. Mais pour ce faire l'arbre n'est pas nécessaire, on peut très bien avoir recours à des associations d'herbacées, qui sont plus efficientes : céréales/trèfles et autres lotiers, céréales/légumineuses à graine, luzerne/graminées prairiales, etc.

Donc dans l'idéal, en sol profond, l'association arbres/cultures doit être également accompagnée d'une association cultures/autres herbacées, ce qui revient à faire en été une association arbres/couvert herbacé : en année sèche le couvert herbacé ne donnera presque rien, mais c'est pas grave les arbres iront pomper le peu d'eau qu'il y a au fond, en année humide le couvert herbacé valorisera une bonne partie des précipitations estivales avec un meilleur rendement que l'arbre qui, lui, valorisera toujours au moins une partie de l'eau profonde ; on ne perd donc jamais grand chose, même si les ligneux ne couvrent pas tout en été, et on valorise mieux l'eau (plus de place aux herbacées cultivées et aux herbacées de couverture que dans un système où l'arbre prend toute la place en été).

Après en sol profond et climat sec (type méditérannéen par exemple) l'arbre peut devenir plus productif en biomasse récoltable que l'herbacée, auquel cas l'arbre prendra plus de place : par exemple association oliviers/fourrages d'automne-hiver-printemps ou oliviers/cultures à cycle court (absente en été), ou encore arbres à bois/prairie (qui fera l'essentiel de sa production de biomasse en dehors de l'été), etc.

J'observe par ailleurs que les milieux dans lesquels on trouve les plus gros indices foliaires sont les milieux humides, qu'ils soient dominés par des herbacées ou des ligneux, les milieux secs se caractérisant plutôt par un étage de feuilles en pleine lumière sous lequel les feuilles ombragées sont rares : la complémentarité que l'on peut tirer d'une association d'architectures différentes est donc plutôt maximale en période humide et minimale en période sèche (il n'y a guère que le buis et le fragon qui font exception, à ma connaissance, mais qui sont aussi des plantes très peu productives).

Je serai curieux à ce propos d'avoir un ordre de grandeur pour les consommations en eau de persistants tels le pin sylvestre en période hivernal. Associer persistants et caduques pour lisser un peu les excès d'eaux hivernaux paraît un petit plus également dans la lutte contre la lixiviation.


Les persistants ne sont par contre pas du tout complémentaires avec les herbacées, alors que de nombreuses herbacées peuvent pomper un paquet de flotte en automne sans gêner la culture : regarde ce qui se fait en colza associé et en biomax d'été/automne avant blé/protéagineux d'hiver, qui limitent beaucoup l'intensité et la fréquence des épisodes d'hydromorphie.


En fait la forêt est imparfaite car la densité d'arbres à l'hectare limite la strate herbacée pendant la haute saison (surtout le hètre de l'étude dont tu as partagé le lien) et la lisière est imparfaite car elle n'est svt constituée que d'arbres jeunes, qui n'ont donc qu'une faible capacité d'exploration des profondeurs du sol.
L'agroforesterie est un entre deux particulièrement intéressant puisqu'il s'inspire du modèle de la lisière avec des arbres plus âgés.
Il m'apparaît par contre dommage de couper les arbres aussi tôt, impératif économique oblige.
J'espère un jour voir arriver des arbres de port libre dans des systèmes maraîchers, vergers, qui n'auront pas de fonction économique direct, mais apporteront de la rentabilité par l'ensemble de services qu'ils fournissent (ex: pin sylvestre dans un verger: zone de nidification, consommation d'eau en hiver donc lissage des excès d'eau, aération du sol par l'oscillation de la cime lors des vents), atténuation de la violence des pluies,...)


L'arbre ne s'imposera jamais dans les champs s'il ne rempli pas, en plus de ses autres fonctions, une fonction productive : il complexifie la gestion du système et concurrence toujours au moins un peu les herbacées, il faut donc qu'il produise quelque chose de tangible en contre-partie.

Pour moi le plus efficace des systèmes agroforestiers en milieu tempéré doit ressembler à une association têtards/cultures d'hiver : on amène les arbres à des durées de vie très élevées et c'est la forme la plus productive en bois-énergie. Par contre on ne peut guère récolter que du bois énergie, sauf à considérer quelques marchés de niche (osiers, fleurs de tilleuls, éventuellement des fruits avant la coupe, ...). Peut-être qu'on verra se genre de système se développer si une filière bois-énergie vraiment importante se met en place, et surtout si elle est suffisamment rémunératrice pour justifier les têtards (plantation, chantiers de récoltes, manutentions, stockage, adaptation de la mécanisation, temps de retour sur investissement, ...).

Quand tu dis que le labour rajeunit les sols, je ne suis pas sûr de saisir. Si le sol dégage, on se retrouve avec la roche mère et des siècles à attendre pour qu'un début de sol arrive, non ? Je dois mal comprendre le principe du rajeunissement. Entre un sol acide et pas de sol, il vaut mieux pas de sol ? o.Ô


En pédologie lorsqu'on parle de "sol jeune", de "rajeunissement", etc, on ne fait pas le jugement le valeur qui l'accompagne dans le langage courant, il n'y a ni connotation positive ni connotation négative : il s'agit seulement de situer un sol sur la frise chronologique de la pédogenèse, plus tu es proche du début plus le sol est jeune, plus tu es proche de l'état le plus avancé (mais qui n'est pas un état final) plus le sol est vieux. C'est du reste valable plus généralement dans toute l'écologie ; une forêt mature est une forêt qui n'accumule plus de biomasse (autant de perte de C que de fixation de C), un arbre mature c'est à peu près la même chose, un arbre juvénile c'est généralement un arbre qui ne s'est pas encore reproduit, etc.
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par flyingdust » 18 Jan 2016 23:04

L'ennui avec le pur trôgnes, c'est que le sytème racinaire dévelloppé est aux dimensions de la trôgne en elle même, donc pas énorme.
Donc c'est pas mal d'alterner quelques trôgnes avec un arbre de haut jet à chaque fois, afin de pouvoir coloniser des horizons plus profonds du sol, que l'eau suive le chemin des racines en cas d'excès d'eau, qu'une oxygénation profonde du sol se fasse avec les oscillations de la cime,...

Je me suis mal exprimé quand je parlais d'augmentation de la surface photosynthétique, à part si on les fout au nord au fond du terrain, du coup on pique la lumière au voisin :-)
En fait je pensais plutôt à l'efficacité photosynthétique, dans le sens que comme plus d'eau est consommée, ça permet plus de photosynthèse, puisque les capacités de pompage sont complémentaires, et que en cas de manque d'eau, les stomates des plantes se rétractent, diminuant leur capacité à capter l'énergie lumineuse. Donc oui l'énergie lumineuse qui frappe une surface donnée reste la même avec ou sans arbres, mais elle est mieux captée lorsqu'il y a une complémentarité arbre/couvert végétal.
Modifié en dernier par flyingdust le 20 Jan 2016 00:40, modifié 1 fois.
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par Madudu » 19 Jan 2016 22:27

Alterner trognes et arbres de hauts jets ça revient à faire une haie. Alors qu'accumuler les trognes ça revient à pousser l'association à son maximum, certes au profit des herbacées et aux dépends des performances des ligneux, mais toute association est de toute façon un compromis. D'ailleurs haie et trogne de plein champ ne s'excluent pas l'une l'autre, on peut très bien faire les deux en même temps.

Je pense quand même que l'architecture du système racinaire de la trogne est grosso-modo la même qu'un arbre agroforestier de haut jet :

-Dans tous les cas le sol est asséché en surface par les herbacées lorsque le ligneux a terminé la mise en place de son feuillage, même davantage pour la trogne l'année qui suit une coupe puisque la première année ne lui suffira pas à le reconstituer totalement. La trogne devrait donc chercher l'eau au fond à peu près de la même manière que l'arbre de haut jet.

-C'est la demande moyenne en eau qui va piloter la profondeur du système racinaire, plus elle est élevée et plus l'arbre va chercher profond quoi qu'il arrive, même si cette demande élevée n'est pas liée à l'IF/individu mais à l'IF totale du peuplement ligneux.

-Si la demande en eau de la strate ligneuse en été dépend surtout de l'indice foliaire (prenons l'indice foliaire moyen sur un cycle de coupe pour la trogne), on doit pouvoir jouer sur pas mal de leviers pour ajuster la demande moyenne à la quantité moyenne d'eau disponible sur l'été : densité, durée de l'intervalle entre deux coupes, espèce. Plus on coupe souvent pour un même IF au moment de la coupe, et plus l'IF moyen est proche de l'IF maximum, le minimum théorique de la différence entre les deux étant obtenu par une coupe annuelle (à ce moment ils sont égaux) : du coup plus le milieu est humide ou le sol profond, plus on peut augmenter la densité et se tourner vers des ligneux à croissance rapide (donc intervalle entre deux coupes faible) propres aux milieux humides (saules, frêne, bouleau, ...) et, ainsi, plus on valorise d'eau ; à l'inverse plus le milieu est sec ou le sol superficiel et plus on se tournera vers des densités faibles, des espèces à croissance plus lente (chênes, châtaigner...), qui valoriseront en moyenne moins d'eau. Entre les deux extrêmes on peut penser au tilleul, aux sorbus (sol profond, climat sec), au merisier, au charme, au hêtre, au robinier (sol moyennement profond à profond, climat plutôt humide), ...

Mais je te l'accorde, un arbre de haut jet fera toujours mieux qu'une trogne en terme de consommation d'eau, l'un et l'autre n'ayant pour moi pas les mêmes fonctions : la trogne étant une forme adaptée à la maximisation du land equivalent ratio, le haut jet étant adapté à des produits à plus grande valeur ajoutée (bois d'oeuvre et d'ébénisterie) et à des fonctions qu'il est le seul à pouvoir remplir (brise-vent surtout, mais aussi production de fruits pour le noyer, piquer la lumière au voisin... :siffle: ).

Par contre j'ai jamais entendu parler de ton histoire d'aération par les oscillations de la cime, là comme ça j'y crois pas trop :0
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par flyingdust » 20 Jan 2016 00:34

Ben c'est de la simple logique et observation, t'as déjà vu des grands arbres sur fût très long, de type hêtres par ex, osciller avec le vent en fôret, parfois on peut même voire toute une galette bouger.
Le principe est assez comparable à une fourche, et une fourche...ça aère :P

Pour l'histoire des racines qui se développeraient bien malgré l'émonde du houpier, en fait à prioris j'aurai tendance à être d'accord avec toi, l'ancrage serait forcément moins développé puisque plus dispensable, mais pas forcément pour la quête d'eau et de minéraux.
En tout cas, ce qui se dit dans la presse spécialisée la dessus (christophe Drénou: les racines face cachée des arbres), c'est que quand on étète, on perd également le pivot, et qu'un tétard va faire un grand nombre de racines fines, mais quasi pas de grosses racines ramifiées d'ancrage. M'enfin peut être bien. Soit le tétard est malgré tout capable de développer des racines qui peuvent pénétrer profondément dans le sol en quête d'eau, soit c'est la taille régulière, opérant sur lui un rajeunissement permanent, une forte migration des réserves nutritives, bourgeons latents, barrières chimiques (phénols) au niveau des coupes qui lui confère une excellente plasticité en cas de stress hydrique (les feuilles vont tomber, puis de nouvelles branches vont repartir à la première pluie, bien plus facilement qu'un arbre mature non taillé): peut être bien des deux! ::d
cette technique a encore de nombreux secrets à nous dévoiler!
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Message par Madudu » 20 Jan 2016 18:47

Les expériences d'Agroof montrent que même privés de leur pivot (transplantation) les arbres de haut jet ont un système racinaire profond lorsqu'ils sont associés à des cultures d'hiver au moins 2 ans sur 3. Ils ont carrément déterrés des systèmes racinaires entiers pour voir la répartition des racines dans le profil :ghee:

Comme ça n'est apparemment pas piloté uniquement pas le besoin d'ancrage, mais aussi par les besoins en eau, je pense que le têtard va réagir de manière similaire : sous doute moins profond, sans doute avec moins de charpentières, etc, mais similaire "en tendance" quand même.
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par flyingdust » 26 Jan 2016 23:04

Si je synthétise un peu tout ce dont on a discuté, il y a donc 4 éléments clés à favoriser pour qu' une plante pousse bien: la lumière, l'eau, les éléments minéraux, l'azote.
L'apport de matière carbonnée est ce qui va donner le plus d'humus, l'humus est le composé du sol qui offre la meilleure efficience de l'eau, l'eau est indispensable à la photosynthèse. L'humus est également un bon rétenteur de minéraux, mais les libère de façon lente.
Il reste un quatrième élément, l'azote, azote qui a tendance à se raréfier dans un sol humifère, car la vie fongique s'y déploie et s'accapare une bonne partie de la ressource.
Deux options (sans les apports de synthèse) pour augmenter la teneur en azote des sols (sans les labourer): installer régulièrement des associations incluants des légumineuses, qui augmentent la teneur en azote du sol, et donne cette azote accumulée aux autres plantes lorsqu'elles sont fauchées et se décomposent, et l'utilisation de fumier.
Certaines plantes se satisfont de peu d'azote, d'ailleurs en général ce sont des bisannuelles (panais, carottes, oignons, aulx, poireaux,...)

Vu que la fiente de volaille est la plus riche en azote (la poule n'urine ni ne défèque séparément, ses fientes sont un package liés par du calcium, donc très peu de pertes d'azote, contrairement à l'urine classique), et que les copeaux de bois tout en attirant une important faune épigées et des insectes en tout genre (ex: cloportes) dont sont friands les poules, en associant judicieusement les deux (plus on met de copeaux, plus on peux mettre de poules, on devrait obtenir un substrat assez équilibré, à la fois humifère et riche en azote facilement assimilable, terreau de choix pour plantes nitratophiles... J'ai bon?
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par Madudu » 27 Jan 2016 13:57

L'azote fais partie des éléments minéraux, donc on peut réduire les principaux facteurs de variation de la productivité primaire, sur lesquels on peut plus ou moins agir, à 3 éléments (on pourrait ajouter la chaleur) :

-L'eau : qui est limitante presque partout sur terre, mais généralement moins que les éléments minéraux. Pour bien gérer l'eau il faut d'abord étudier la variation saisonnière de sa disponibilité et définir les périodes pendant lesquelles elle est peu, pas ou très limitante. L'efficience de l'eau se mesure en mm/Kg de MS, dépend de l'espèce, de la fertilité minérale, de la température, etc. La RU (Réserve Utile) est la quantité d'eau disponible pour les plantes dans un sol à son maximum d'humidité et ressuyé : elle augmente avec le taux de matière organique, d'argile et de limon, ainsi qu'avec l'épaisseur de l'horizon exploité par le système racinaire des plantes.

-La lumière : très rarement limitante, en tous cas généralement moins que les minéraux et l'eau. Comme l'eau il est important de connaître la variation saisonnière de sa disponibilité (très limitante en hiver, jamais limitante en été). Le rendement de la lumière (énergie fixée par la photosynthèse sous forme de liaisons chimiques/ énergie contenue dans la lumière incidente) ne dépasse jamais 2%.

-Les minéraux : surtout ceux qui servent à constituer les protéines (N, P, dans une moindre mesure S) et ceux qui servent à réguler le fonctionnement des cellules (K surtout, mais aussi plein d'autres dans une moindre mesure). Ils sont généralement le principal facteur limitant la productivité, surtout N. En climat tempéré ils sont notamment très limitants pendant le premier printemps (mars-avril) : les jours sont déjà relativement long, donc la lumière abondante (peu limitante), et l'eau n'est pas encore limitante ; mais la température du sol étant encore faible, la minéralisation l'est également, et les minéraux manquent beaucoup plus que la lumière et l'eau (ils sont très limitants).

Le plus limitant de tous les minéraux, N, est en bonne partie séquestré dans la matière organique du sol et est coûteux à introduire dans le système. Pour maximiser la quantité disponible on peut jouer sur deux indicateurs : la quantité totale contenue dans le système (l'azote totale, en Kg/ha) et le taux de minéralisation de la matière organique (en % d'elle-même). Le taux de minéralisation de la MO est d'autant plus élevé que le C/N de ladite MO est faible, d'autant plus également qu'elle est "fraiche", c'est-à-dire qu'elle n'a pas encore été transformée en molécule stable type acides créniques, fulviques, humiques (humus).

L'efficience de l'azote (Kg dispo par an/ azote total) est donc maximale pour des MO fraîches à faible C/N et ces dernières sont, en l'absence d'azote de synthèse, les seules qui puissent augmenter significativement et à moindre coût la disponibilité en éléments minéraux pendant le premier printemps. Cette même efficience est donc minimale pour des MO compostées à C/N élevé.

Lors de l'humification d'une MO frâiche, une partie de son contenu en N est séquestré par une partie de son contenu en C : lorsque le C/N est élevé l'humification d'une MO fraîche peut séquestrer plus de N qu'elle n'en contient, l'efficience de l'azote de cette MO est alors négative : c'est la faim d'azote.

Par ailleurs le compostage induit le plus souvent de lourdes pertes de N, K, S et Ca du fait de l'écoulement des jus et de l'exposition aux pluies, au soleil, à la sécheresse, etc. Pour un tas de fumier en plein air, retourné une ou deux fois avant épandage et qui passe plusieurs mois dehors, la perte de nutriments au cours du compostage est de l'ordre de 50% de la quantité initiale pour N, K, S et Ca. Les pertes de P sont pas contre toujours faibles.

Les besoins en N varient d'une plante à l'autre. On peut grosso-modo lier le besoin en N d'une plante à son contenu en protéines (taux de protéine x quantité de MS) : ainsi les légumes-racines et les légumes-bulbes ont de faibles besoins, les légumes-feuilles (ou qui font beaucoup de feuilles, comme la patate) et les légumes-fruits (qui ont généralement beaucoup de feuilles) ont des besoins élevés.
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par 0tyugh » 27 Jan 2016 16:16

Madudu a écrit :Le rendement de la lumière [...] ne dépasse jamais 2%.

Tu peux reformuler ?

Sinon tout ça me rappelle beaucoup mes premiers cours de biologie du lycée avec les atomes majoritaires du vivant ; en ordre ; CHONPS.
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par Madudu » 27 Jan 2016 19:37

Quand je disais que ça valait le coup de réviser sa physique/chimie :P

https://fr.wikipedia.org/wiki/Photosynth%C3%A8se#Efficacit.C3.A9_.C3.A9nerg.C3.A9tique_de_la_photosynth.C3.A8se

Là ils disent 5 à 6% max, bon... de l'ordre de quelques % quoi :)
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par satya » 27 Jan 2016 20:09

passionnant :-/ les vieux schémas qui font qu'on en est là aujourd'hui ...... sortons nos calculettes dans les champs et si le vivant fout le camps c'est tan mieux on peut s'en passer et en général il est nuisible par ce que pas prévu sur le papier :contrac:
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par flyingdust » 27 Jan 2016 20:50

Donc, ok, je me rend compte avec les définitions que tu donnes, que je pige pas encore exactement comme ça fonctionne, je vais continuer à creuser ce truc là :D
Mais en fait j’avais une question un peu cachée que je vais reformuler avec un exemple concret: Si on épand un paillage à c/n élevé au mois de novembre, puis quelques semaines plus tard quand la faune épigée l'a bien colonisé, on lâche beaucoup de poules sur la zone pendant quelques semaines, puis on laisse les champis faire leur boulot au calme, est ce que le c/n aura baissé, est ce qu'on aura récupérer de l'azote supplémentaire?
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Re: Composter c'est polluer? Et autres réflexions inhabituel

Message par Madudu » 27 Jan 2016 21:15

Si tes poules sont nourries au grain elles vont le chier sur ta paille, donc oui elles vont apporter de l'azote.

Sinon, si elles se nourrissent exclusivement sur le terrain elles vont juste transformer des végétaux et des invertébrés en crottes, donc en azote dispo pour ta paille (mais y a pas d'augmentation du N total).

Et dans tous les cas en grattant elles vont simuler la minéralisation, donc sortir de l'azote dispo (mais sans augmenter le N total, encore une fois).

Satya : donc pour toi si l'agriculture conventionnelle est ce qu'elle est c'est à cause du principe de conservation, et qu'il suffit de croire qu'on va le violer pour pouvoir proposer des alternatives crédibles ?
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